Mobilier en bois de palette : bonne idée ou fausse bonne idée pour votre intérieur ?

Fabriquer son mobilier en bois de palette récupérées est devenu une véritable tendance. Tables basses, têtes de lit, jardinières, étagères ou encore salons de jardin : les réseaux sociaux regorgent de tutoriels qui séduisent les amateurs de bricolage créatif et de décoration économique.

mobilier en bois de palette, quel impact sur la qualité de l'air intérieur

Au premier abord, cette pratique s’inscrit parfaitement dans une démarche d’économie circulaire : réutiliser des matériaux déjà produits, réduire les déchets, limiter l’achat de bois neuf et encourager la récupération. Mais derrière cet aspect écologique séduisant se cache une réalité moins connue : le bois de palette est souvent traité avec des produits chimiques, dont l’introduction dans l’air intérieur de nos logements n’est pas sans conséquences pour la santé.

L’attrait écologique du mobilier en bois de palette

Recycler du bois de palette répond à une double logique :

  • Écologique : prolonger la durée de vie d’un matériau déjà existant, éviter son incinération ou sa mise en décharge.
  • Économique : obtenir du mobilier robuste et original à faible coût, parfois gratuitement.

Cette tendance séduit particulièrement ceux qui souhaitent consommer autrement, limiter l’impact environnemental de leur décoration et donner une seconde vie à des objets. Sur le papier, il s’agit donc d’une solution vertueuse.

Ce que l’on sait moins : le bois de palette est traité

Les palettes, utilisées dans le transport et la logistique, doivent résister à des conditions extrêmes : humidité, variations de température, infestations d’insectes et champignons. Pour assurer leur durabilité et éviter la propagation de nuisibles entre pays, elles sont systématiquement traitées.

Deux grandes méthodes existent :

  • Traitement thermique (HT) : le bois est chauffé à plus de 56 °C pendant au moins 30 minutes, une solution relativement neutre.
  • Traitement chimique : le bois est imprégné d’insecticides et de fongicides pour le protéger durablement. Historiquement, certains traitements contenaient même du bromure de méthyle, aujourd’hui interdit car très toxique.

De nombreux produits chimiques restent encore utilisés, notamment des biocides et des fongicides triazoles (tébuconazole, propiconazole), ainsi que des insecticides de la famille des pyréthrinoïdes (perméthrine, cyperméthrine) ou des organophosphorés.

Des substances toxiques dans l’air intérieur

Une fois le bois de palette transformé en mobilier et installé dans le logement, ces traitements ne disparaissent pas. Ils continuent de dégazer et de contaminer les poussières domestiques. En effet, les produits chimiques utilisés sont des Composés Organiques Semi-Volatils (COSV) qui contaminent durablement l’environnement intérieur.

Les substances concernées sont préoccupantes car :

  • Certaines sont des perturbateurs endocriniens (triazoles, organophosphorés),
  • D’autres sont neurotoxiques (inhibition de la cholinestérase par certains insecticides), En effet, les insecticides de la famille des pyréthrinoïdes ou des organophosphorés sont neurotoxiques et affectent le fonctionnement du système nerveux chez l’Homme.
  • Elles sont souvent persistantes et peuvent s’accumuler dans l’environnement intérieur.

Le risque est alors celui d’une exposition chronique, invisible et sous-estimée, pour les occupants du logement. Les enfants, qui passent beaucoup de temps au sol et portent les mains à la bouche, sont particulièrement vulnérables.


Quels effets sur la santé des traitements appliqués sur le bois de palette ?

Selon la nature du traitement subi par le bois de palette, les risques incluent :

  • Irritations respiratoires et cutanées,
  • Maux de tête, fatigue, troubles de la concentration, liés à l’inhalation de composés organiques volatils,
  • Perturbations hormonales, avec un impact possible sur la fertilité, la croissance et le développement,
  • À long terme, un risque accru de cancers hormonodépendants ou de troubles neurologiques.

Il est important de rappeler que la qualité de l’air intérieur est déjà dégradée par de nombreux polluants (formaldéhyde, COV, phtalates). L’ajout de meubles issus de palettes traitées vient alourdir ce cocktail chimique.

Quelles précautions si vous souhaitez recycler des palettes ?

Si vous êtes tenté par l’aventure du mobilier en palettes, quelques recommandations s’imposent :

  • Vérifiez les marquages : privilégiez les palettes marquées HT (Heat Treated), qui indiquent un traitement thermique sans produits chimiques. Évitez les palettes marquées MB (Methyl Bromide), désormais interdites mais encore présentes dans les circuits de récupération.
  • Évitez les palettes tachées ou odorantes, qui peuvent avoir été contaminées par des produits chimiques durant leur utilisation.
  • Poncez et aérez longuement le bois avant de l’introduire dans le logement.
  • Scellez la surface avec un vernis ou une peinture à faible émission de COV, afin de limiter le relargage de substances.
  • Privilégiez une utilisation extérieure (salon de jardin, bacs de culture) plutôt qu’en intérieur clos.

Conclusion : le mobilier en bois de palette, une fausse bonne idée pour l’intérieur

Le mobilier en palettes incarne une démarche créative et écologique séduisante. Mais il convient de ne pas négliger son versant sanitaire. Le bois des palettes, traité pour résister aux contraintes logistiques, est porteur de substances chimiques préoccupantes qui peuvent altérer la qualité de l’air intérieur et exposer les occupants à des risques chroniques.

Ainsi, si l’idée reste pertinente dans une logique d’upcycling et d’aménagement extérieur, elle doit être abordée avec prudence pour un usage intérieur.

Recycler oui, mais pas au détriment de la santé.

Crédit photo Lucas Santos sur Unsplash