La qualité de l’air intérieur, ça coûte cher ? Un enjeu de santé publique et d’économie du quotidien
Nous passons plus de 80 % de notre temps dans des espaces clos : logements, écoles, bureaux, transports… Or, l’air intérieur est souvent bien plus pollué que l’air extérieur, jusqu’à 5 à 10 fois plus selon l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI). Cette pollution invisible a un coût : près de 20 milliards d’euros par an en France, selon une étude menée par l’ANSES et l’ADEME en 2014. À travers cette estimation, ce n’est pas seulement la santé qui est en jeu, mais également la performance économique, l’efficacité énergétique des bâtiments et la qualité de vie.

Alors que faire ? Bonne nouvelle : des solutions simples, efficaces et peu coûteuses existent. Trois grands axes permettent d’agir : réduire les sources de pollution, améliorer la ventilation et traiter l’air par filtration. Zoom sur un problème encore trop sous-estimé… et sur des solutions accessibles à tous.
L’air intérieur : un cocktail invisible de polluants
La pollution de l’air intérieur est un mélange complexe de composés chimiques, biologiques et particulaires. Elle provient :
- Des matériaux de construction ou de décoration (formaldéhyde, benzène, phtalates, etc.) ;
- Des meubles et textiles traités (retardateurs de flamme, solvants) ;
- Des activités humaines (cuisson, tabagisme, bricolage, ménage) ;
- Du chauffage ou de la combustion (particules fines, monoxyde de carbone) ;
- De la pollution extérieure qui pénètre à l’intérieur (ozone, dioxyde d’azote, particules fines).
Ces polluants peuvent provoquer des effets aigus (irritations, maux de tête, allergies, crises d’asthme) et chroniques (maladies respiratoires, troubles cardiovasculaires, cancers). Les personnes les plus sensibles sont les enfants, les personnes âgées, les malades chroniques (pathologies respiratoires), mais toute la population est exposée avec des risques sanitaires à moyen et long termes.
Un coût invisible… mais colossal de la mauvaise qualité de l’air intérieur
Dans son rapport publié en 2014, l’ANSES a chiffré le coût socio-économique de la pollution de l’air intérieur à 19 milliards d’euros pour la France. Cette estimation comprend :
- Les dépenses de santé (hospitalisations, consultations, traitements médicaux) ;
- Les pertes de productivité liées à l’absentéisme et à la baisse de performance au travail ;
- La dégradation de la qualité de vie et du bien-être ;
- Les coûts indirects : échecs scolaires, pertes d’apprentissage, impact sur le système de santé publique.
À titre de comparaison, ce montant est supérieur au budget annuel de certains ministères et pourrait financer plusieurs centaines d’hôpitaux, d’écoles ou de rénovations énergétiques. Agir sur la qualité de l’air intérieur, c’est donc investir dans la santé publique, mais aussi dans l’économie nationale.
Trois leviers pour améliorer la qualité de l’air intérieur… à la portée de tous
Réduire ou éliminer les sources de pollution
C’est le levier le plus efficace, et aussi le moins coûteux. Il s’agit d’éviter d’introduire ou de générer des polluants à l’intérieur. Cela passe par des gestes simples :
- Choisir des matériaux et produits labellisés (Écolabel, étiquetage A+, etc.) lors des travaux ou de l’achat de mobilier ;
- Limiter l’usage de produits d’entretien agressifs ou parfumés : privilégier le vinaigre blanc, le savon noir ou les produits sans COV ;
- Interdire le tabac à l’intérieur ;
- Utiliser des hottes aspirantes en cuisine ;
- Éviter les bougies, encens, aérosols parfumés, souvent très émissifs.
Réduire les sources de pollution, c’est prévenir à la racine. C’est aussi la solution la plus économique, car elle évite la surconsommation de dispositifs de purification coûteux.
Améliorer le renouvellement de l’air
Ventiler, c’est vital. Une bonne aération permet d’évacuer les polluants accumulés et d’introduire de l’air frais. Or, dans de nombreux logements, la ventilation est inefficace, insuffisante ou mal entretenue. Quelques bonnes pratiques à adopter :
- Ouvrir les fenêtres 5 à 10 minutes deux fois par jour, même en hiver ;
- Aérer davantage en cas d’activités polluantes : ménage, cuisson, travaux ;
- Entretenir les VMC (nettoyage des bouches, contrôle du débit) ;
- Ne pas obstruer les grilles d’aération.
Ce geste de bon sens est gratuit, mais d’une efficacité redoutable. Le renouvellement de l’air est aussi essentiel pour maintenir un taux de CO₂ bas, en particulier dans les ERP (établissements recevant du public), où une concentration élevée altère la concentration, le confort et la performance cognitive.
Traiter l’air intérieur avec des dispositifs de purification
Lorsque les deux premières étapes ont été mises en œuvre, il peut être judicieux d’utiliser un purificateur d’air intérieur. Ces appareils sont équipés de filtres HEPA (contre les particules fines, allergènes, spores de moisissures) et de filtres à charbon actif (contre les COV, odeurs, gaz). Leurs bénéfices sont réels dans certaines situations :
- Logements urbains à forte exposition ;
- Logements occupés par des personnes sensibles ou allergiques ;
- Pièces sans possibilité d’aération suffisante ;
- ERP dans des zones polluées ou mal ventilées.
Mais attention : ces dispositifs doivent être choisis avec soin, en tenant compte de leur CADR (Clean Air Delivery Rate), et entretenus régulièrement (remplacement des filtres). Ils représentent un coût d’achat et de maintenance, à intégrer dans le projet.
Une démarche à la portée de tous
La qualité de l’air intérieur ne dépend pas uniquement de la technologie ou de l’investissement financier. Elle repose d’abord sur des habitudes et des choix éclairés :
- Ventiler régulièrement,
- Réduire les sources polluantes,
- Adopter des produits sains,
- Contrôler son environnement.
Agir sur la qualité de l’air, c’est aussi protéger les plus vulnérables, réduire les coûts pour la collectivité et améliorer la qualité de vie de chacun.
C’est une réalité, la mauvaise qualité de l’air intérieur coûte cher. Mais l’améliorer ne coûte pas forcément beaucoup. Les deux premiers axes (réduction des sources et ventilation) sont accessibles à tous et largement suffisants dans la majorité des cas. Le troisième (purification) peut venir en soutien ponctuel, notamment dans les environnements à risque.
Mieux respirer chez soi, à l’école ou au travail, c’est possible… sans se ruiner !
Crédit photo boris misevic sur Unsplash